Pourquoi semble-t-il que les individus dans certains pays font des découvertes impressionnantes et ceux dans d’autres ne font rien qui contribue au patrimoine mondial ? Et est-ce que ces opportunités sont liées au bonheur individuel ?
Voilà les questions qui me gênent dès que j’ai passé cinq ans aux Etats Unis et cinq ans en Europe de l’Ouest avant de rentrer il y a douze ans dans mon pays natal, la Bulgarie.
Est-ce que les individus aux Etats Unis sont plus intelligents que ceux en Europe pour faire la plupart des découvertes intéressantes dans le dernier siècle ? Ou c’est bien leur société qui les inspire ? D’après moi c’est un mélange des deux. Le total encourage l’individu à explorer, à faire des erreurs innombrables. Pourquoi la société américaine est si tolérante ? Parce qu’il n’y a pas de race, ethnicité et religion dominants. La plupart des gens savent qu’ils sont un mélange de gênes et croyances donc ils n’essaient pas tout le temps à se dominer l’un à l’autre.
En Europe, au contraire, il y en a. Quand j’étais à Paris, je demandais aux gens souvent : « Pourquoi vous faites ça ou pourquoi vous dites ça? » La réponse était souvent la même : « C’est comme ça ». L’individu a une énergie limité à poser des questions, à essayer d’être original. A un certain moment il commence à répéter l’opinion dominant et lui-même à répondre avec : « C’est comme ça ».
« Tout est social » - disait un de mes amis iraniens quand nous avons entendu la présentation de notre professeur sur l’individualisme méthodologique et le holisme. « Tout se passe dans le soukh, le marché oriental, où les gens se rencontrent et échangent des idées ». « Impossible » - je me suis dit à l’époque. « J’ai des milliers d’opinions personnelles qui ne viennent pas de la société ». Dix-huit ans après je suis plutôt d’accord avec mon ami iranien. J’ai découvert que 100% de mes opinions viennent de mes parents, de mes amis, da ma société natale, des sociétés où j’ai vécu. La seule chose qui est originelle en moi, c’est la façon dont j’utilise et je combine ces opinions.
Le moment où j’ai découvert qu’il n’y a rien d’originel en moi, je me suis senti déçu. « J’ai passé trente ans dans les universités et travaux les plus prestigieux dans le monde pour devenir un individu distingué » - je me suis dit avec tristesse. Mais peu après je me suis senti soulagé. Ce n’est pas ma faute à moi que je ne suis pas un génie qui découvre des apps pour devenir une licorne. C’est que les limites de la société où j’habite sont tellement strictes, qu’il me faut 99% de mon énergie mentale seulement pour survivre, donc il me reste presque rien pour découvrir quelque chose de nouveau.
Est-ce que ça me fait me sentir malheureux ? Si je me compare avec mes contemporains en Europe de l’Ouest et les Etats Unis, oui. Mais si je ne me compare avec personne, si je suis content d’être un individu qui sait qu’il est fortement limité parce qu’il vit dans une société qui est elle-même fortement limitée, je peux devenir libre d’accepter la vie telle qu’elle est, sans regretter être né ailleurs. Parce que l’individualisme même dans les meilleurs endroits dans le monde n’est que méthodologique. Voilà pourquoi je me souviens souvent les mots de mon écrivain préféré, Albert Camus, « Il faut imaginer Sisyphe heureux ».